Ah oui, avant que je passe à une nouvelle étape de ma
petite vie, il faut que je vous dise que mes parents ont appris,
au mois d'août 1992, que j'aurais, soit un petit frère ou une
petite soeur l'année suivante. Au mois d'octobre, maman est
allée, à la demande de son médecin, passer une échographie
détaillée à l'hôpital Royal Victoria car elle était
"grossesse à risque" à cause de moi. Mes parents et
le médecin voulaient savoir, le plutôt possible, si c'était un
petit frère ou une petite soeur qui poussait dans le ventre de
maman. Car si c'était une fille, il y avait le risque qu'elle
ait, elle aussi, le syndrome de Rett. Et comme il n'y avait
aucun autre moyen de le savoir, mes parents auraient une
décision à prendre. Continuer la grossesse ou l'arrêter. Mais
heureusement, l'échographie a permis de voir que j'allais avoir
un petit frère. Mes parents étaient très heureux même s'ils
avaient décidé que, peu importe le sexe, ils auraient quand
même ce petit bout de chou qui grandissait dans le ventre de
maman. Ils se sont même dit que, si c'était une fille et
qu'elle avait le même syndrome que moi, au moins ils sauraient quoi faire ayant déjà vécu 4 ans et demi avec moi.
Donc, pour poursuivre le récit de ma petite vie, nous
sommes maintenant en février 1993, j'aurai 5 ans dans 2 mois.
Maman est enceinte de 7 mois. Je me réveille souvent la nuit vers 1h du
matin. Je suis de bonne humeur. Parfois je me rendors sinon je
cris et je ris pour que mes parents m'entendent. Papa vient
alors me chercher pour m'amener dans leur lit et pour essayer de
me rendormir, mais ça ne marche pas. Je reste réveillé
jusqu'à 3, 4 heures du matin. Ma mère est découragée car le
manque de sommeil commence à l'affecter. Elle ne dort pas très
bien à cause de son gros bedon. Comme son accouchement approche
à grand pas et qu'elle a décidé d'arrêter trois semaines
avant la date prévue, elle se dit qu'elle pourra reprendre le
sommeil perdu pendant ces trois semaines là car papa continuera
d'aller me
reconduire chez grand-mère pour que je puisse
aller à l'école.
Dans la journée du 22 avril, maman commence à avoir des
contractions. Elle appelle papa dans l'après-midi pour lui dire
de ne pas aller me chercher chez grand-mère parce que mon petit
frère commence à faire son petit bout de chemin pour voir la
lumière du jour. Elle téléphone, par la suite, à ma
grand-mère pour lui annoncer la nouvelle. À 19h, maman et papa
quitte la maison pour l'hôpital car les contractions sont de
plus en plus rapprochés. Ils savent c'est quoi maintenant,
grâce à moi bien sur ! :) Mon petit frère est né, quelques
heures plus tard, soit à 00h59, le 23 avril 1993. Ah les gars,
comme dirait maman, il aurait pu se forcer et attendre une
minute de plus pour venir au monde à 1h00 du matin et non pas
à 00h59 ! Le lendemain, papa vient me chercher chez grand-mère
pour m'amener à l'hôpital voir mon petit frère. Mais
naturellement, je n'ai pas la réaction d'un enfant normal. Je
le regarde et je souris.
Après le retour de maman à la maison avec mon petit
frère, je continue à me réveiller la nuit. Maman décide
d'appeler mon pédiatre pour lui demander s'il n'y a pas quelque
chose à faire pour m'aider à dormir la nuit car, depuis les
trois derniers mois, je me réveille à presque toutes les nuits.
Il lui conseille d'appeler mon neurologue et de lui en parler.
C'est ce que maman fait tout de suite. Le neurologue lui dit que
je souffre peut-être de crises d'épilepsie nocturnes. Il
prescrit donc un médicament qui m'aidera à dormir la nuit et
à calmer mes crises de pleurs le jour. Quelques semaines plus
tard, je recommence à faire des crises d'épilepsie. Le
neurologue prescrit un nouveau médicament plus puissant que ce
que je prenais déjà.
En juin 1993, mes parents m'inscrivent au camp de
vacances pour une semaine. Cela m'avait fait du bien l'année
d'avant et, avec la venue de mon petit frère, ça va permettre à
mes parents de se reposer un peu plus pendant cette semaine là.
À mon retour du camp, je ne fais plus de crises de pleurs et je
dors toutes mes nuits. Tout un soulagement pour mes parents.
Entre 6 ans et 8 ans, mon comportement et mon
développement sont stable. J'ai un début de scoliose. Ça
c'est la colonne vertébrale qui dévie de sa position. Je suis
suivi en physiatrie pour vérifier l'évolution. Je ne marche
toujours pas mais je marche toujours à quatre pattes. J'ai un
peu de difficulté car je grandis et je m'enfarge souvent dans
mes pieds. Je peux encore m'asseoir toute seule mais j'ai dû
changer ma technique à cause de mes grandes jambes. J'ai
appris à boire au verre pendant mon séjour au camp de vacances
en 1994. Ok, je ne tiens pas mon verre moi-même mais c'est
quand mieux que la bouteille.
Je vais toujours à l'école mais je fais de plus en plus
de crises d'épilepsie. Il parait que c'est normal car notre
épilepsie est pratiquement incontrôlable même avec des
médicaments. Je peux faire jusqu'à 5 crises par jour,
pendant deux ou trois jours. Quand cela arrive, maman m'amène
à l'urgence de l'hôpital de Montréal pour enfants pour faire vérifier mon niveau de médicaments dans le sang. Parfois
quand il est trop bas ça peut causer plusieurs crises.
Un mois et demi avant mon 8e anniversaire, je fais mon
premier statut épileptique. Ça se sont des crises d'épilepsie
à répétition. Rien ne peut les arrêter à part une forte
dose de médicaments pour l'épilepsie. Mais il risque d'y avoir
des conséquences graves comme, le coeur qui arrête de battre
ou les poumons qui arrêtent de respirer. Avant que les
médecins me donne ce médicament, mes parents ont dû prendre
une décision si jamais l'un de ces deux problèmes survenait.
Une fois la décision prise, les médecins m'ont donné du
Phénobarbital à forte dose. Les crises ont arrêté quelques
heures plus tard. Je suis allé aux soins intensifs. Après deux
jours, je suis allé à l'étage des soins médicaux. Je ne me
suis pas encore réveillée depuis la prise du médicament. Les
médecins ont dit à maman que c'était normal car la dose avait
été très forte.
Maman vient à l'hôpital à tous les jours.
Mais un matin, elle arrive à ma chambre et mon lit est vide.
Elle panique. Elle va au poste des infirmières et demande où
je suis. La secrétaire lui dit que je suis retourné aux soins intensifs à
cause de difficulté respiratoire. Maman pleure en retournant dans
ma chambre pour aller chercher mes choses. L'infirmière vient
la rejoindre pour lui expliquer ce qui s'est passé. Elle essaie
de la consoler et de la rassurer. Maman vient donc me rejoindre
aux soins intensifs. En arrivant près de mon lit, elle a un
choc. J'ai plein de fils branchés sur moi et j'ai deux
intraveineuses. Le médecin vient tout de suite voir maman pour
lui expliquer ce qui m'arrivait. J'avais beaucoup de la
difficulté à respirer, je faisais une pneumonie avec beaucoup
de fièvre. Ils ont dû me brancher sur un respirateur qui
m'aidait à respirer. Je n'étais pas intubé parce que je
pouvais quand même respirer par moi-même mais juste à 20%.
À tous les jours, maman téléphone pour avoir des
nouvelles de mon état car elle a dû retourner au travail le
lundi suivant. Les nouvelles sont toujours les mêmes, stable
mais pas d'amélioration.
Le mercredi soir, papa vient me voir seul à l'hôpital.
Il parle avec le médecin qui lui dit que si, dans deux jours,
mon état ne s'améliore pas, je ne passerai pas au travers. En
arrivant à la maison, papa annonce cette nouvelle à maman.
Maman se met à pleurer car elle ne peut pas croire que sa
cocotte va partir. Le lendemain, elle réussit à parler au
médecin et lui dit qu'elle est certaine que le tube qui passe dans
ma gorge, pour m'aider à respirer, est une partie de mon
problème. Elle demande au médecin s'il est possible d'enlever
ce tube et de me donner de l'oxygène avec un masque. Le
médecin dit qu'elle va le faire mais que si mon état ne
s'améliore pas, elle réinstallera le tube. Deux jours plus
tard, je recommence à mieux respirer mais je suis toujours dans
un état semi-comateux. Quelques jours plus tard, je suis de
retour à l'étage car je respire par moi-même. Le médecin des soins
intensifs dit à maman qu'elle connaît bien sa fille et qu'elle
a eu raison de demander d'enlever le tube que j'avais dans la
gorge.
Ça fait maintenant un mois que je suis hospitalisée et je suis toujours dans un état semi-comateux. Le jour de mon 8e anniversaire, le 12 avril, j'ai
ouvert les yeux. Maman et papa sont à mes côtés et ils sont
très contents que je me réveille enfin. Ils vont
maintenant pouvoir voir de quelle façon je vais remonter la
pente car leurs inquiétudes, depuis quelques semaines, est de savoir si mentalement
j'ai des dommages au cerveau.
Une semaine après mon
réveil, je recommence à manger mais de la purée seulement.
J'ai de la difficulté à me tenir la tête droite et je ne suis
pas capable de rester assise seule. Deux semaines après mon
réveil, tout est rentré dans l'ordre. Je suis comme avant mon
aventure. Rien n'a changé à part le manger. Je mange toujours
de la purée. À ma sortie de l'hôpital, un mois et demi plus
tard, j'ai un nouveau médicament pour l'épilepsie à prendre.
C'est le fameux Phénobarbital qui a arrêté mes crises un mois
et demi plutôt. Ils ont également augmenté la dose de l'autre
médicament que je prends depuis l'âge de cinq ans. C'est lui
qui a causé mon statut épileptique car son niveau était trop
bas dans mon
sang.
Maman a pris une semaine de vacances pour s'occuper elle-même
de moi et me réapprendre à manger du solide. Au bout de deux
jours, je mange normalement. Je suis retournée à l'école deux
semaines plus tard et maman s'est arrangée avec mon éducatrice
et ma physiothérapeute pour que je ne fasse pas mon programme
au complet pour ne pas trop me fatiguer.
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